Histoire de la rose de Ravensbrück
*Le 27 mai 1942, des résistants tchèques tentèrent d’assassiner Reinhard Heydrich, vice-gouverneur du Protectorat de Bohême et Moravie, chef de la police et de la sécurité du bureau principal du Reich
C’est à Lidice que commence l’histoire de la rose de Ravensbrück.
C’était un petit village en République tchèque où les occupants fascistes ont commis des actions de représailles d’une extrême brutalité à la suite d’une tentative de résistants tchèques de tuer Reinhard Heydrich.*
Parmi les habitants 199 hommes et jeunes garçons à partir de 15 ans furent fusillés, 184 femmes et jeunes-filles furent déportées en wagons à bestiaux vers Ravensbrück, et 79 enfants déportés au ghetto de Lodz et tués très probablement à Chelmno. Considérés par les nazis comme « germanisables » 8 enfants de Lidice furent donnés à des familles allemandes.
Le village de Lidice fut entièrement brûlé et rasé, et 7 jours plus tard le village de Lezaky fut également détruit et ses habitants assassinés ou kidnappés.
A la libération du camp de concentration de Ravensbrück par l’Armée Rouge, 143 femmes de Lidice rentrèrent dans leur pays d’origine. Dès 1942, il y eut une campagne de collecte de fonds initiée par les britanniques « Lidice shall live » afin de contribuer à la reconstruction du village.
Le 19 juin 1955, 10 ans après la fin de la seconde guerre mondiale et une fois le village reconstruit, la roseraie de Lidice fut inaugurée, la plupart des rosiers ayant été donnés par l’Angleterre. Pour la reconstruction du site et la plantation du jardin la somme de 32 000 livres sterling avaient été collectée par la ville anglaise de Stoke-on-Trent.
Aujourd’hui, le Mémorial de Lidice et ses jardins sont devenus un centre de rencontres internationales et un musée.
En avril 1958, à l’occasion de la journée internationale de la Libération, d’anciennes prisonnières déportées tchèques de Lidice se sont rendues à Ravensbrück pour y planter elles-mêmes 150 rosiers à l’emplacement de la fosse commune, près du mur du camp. « Ces roses doivent pousser et fleurir pour exprimer la victoire sur la mort et l’anéantissement là où l’horreur a eu lieu » c’est ainsi que s’est exprimée Marie Jaroschewa, femme de Lidice.
De cette manière les femmes tchèques créèrent la tradition de planter des roses à Ravensbrück, ce qui entraîna une initiative internationale : des associations de prisonniers de toute l’Europe donnèrent des roses à Ravensbrück.
Cette initiative fut soutenue par le Comité International de Ravensbrück dans un communiqué en mars 1958 et repris dans sa lettre du 30 juin 1958, signée par *Renée Mirande-Laval et Marga Jung. * D’autres initiatives suivirent notamment l’Amicale des Déportées et Prisonnières politiques luxembourgeoises (1940-1945) envoyèrent des rosiers à Ravensbrück dès les premiers jours d’avril 1958. Lily Unden, présidente des anciennes détenues luxembourgeoises déclara que les roses étaient conçues pour se remémorer les 40 luxembourgeoises décédées à Ravensbrück, ou décédées des suites de leur emprisonnement. Par des actes d’une immense générosité des rosiers arrivèrent du monde entier : de Hongrie en novembre 1958, en avril 1959 100 rosiers du Danemark, et également de l’Union Soviétique.
Hélas, en raison de la grande diversité des rosiers, et de leur résistance au climat et à la terre cette initiative échoua au bout de quelques temps. C’est alors qu’à l’initiative de Marcelle Dudach-Roset, membre de l’Amicale de Ravensbrück (France) l’idée de créer une rose qui serait appelée « Résurrection ». Les françaises issues de la Résistance voulaient ainsi symboliser leur lutte politique et leur expérience de la déportation.
Michel Kriloff (France) rosiériste, fut chargé par l’Amicale de Ravensbrück de sa création, et lors du 30ème anniversaire de la libération du camp de concentration un buisson de rosiers « Résurrection » fut planté pour la première fois dans les jardins de la crypte du Mémorial de la Déportation de Paris par Madame Anne-Anymone Giscard d’Estaing, épouse de l’ancien président de la République Française. « Le rosier est le témoin de la barbarie de l’époque hitlérienne. C’est la rose de l’espoir, de la liberté et de la paix » - Communiqué de presse de l’Amicale de Ravensbrück. « L’Amicale voulait laisser des symboles de notre volonté de survivre et de notre résistance » a déclaré Marie-Jo Chombart de Lauwe, présidente de de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation. »
En 2005, lors du 60ème anniversaire de la libération, en raison d’une forte demande, il n’y eut plus assez de pieds de rosiers. Ce n’est qu’en 2010, que le rosiériste Orard à Lyon va reproduire le rosier. « Les rosiers refleuriront pour le 70ème anniversaire de la libération du camp de concentration de Ravensbrück. » Une souscription fut lancée avec succès par l’Amicale « Mille rosiers pour Ravensbrück » Initiatrice de cette campagne Marie-France Cabeza-Marnet, membre du Comité International de Ravensbrück dédiera cette campagne à sa mère Angèle Cabeza : « Résister, revenir, renaître, vivre, mais vivre comme notre rose “Résurrection” »
Grâce à l’immense énergie déployée par l’Amicale de Ravensbrück, un millier de rosiers ont trouvé leur place fin 2014 sur le charnier de Ravensbrück, et dans des lieux où se trouvaient autrefois les camps satellites. Ainsi les roses perpétueront le souvenir des femmes de Ravensbrück.
Depuis 1974/75, le rosier a été planté dans plus de 600 emplacements. Il pousse devant des monuments, dans les cimetières, dans les parcs, dans des chapelles, sur des lieux publics en France, en République tchèque, en Norvège, en Allemagne. Il pousse aussi à la roseraie internationale de Lidice, au cimetière du Père-Lachaise à Paris devant le monument de Ravensbrück et sur la fosse commune devant le mur du camp du mémorial de Ravensbrück, et devant l’ancienne prison de la gestapo « Arkivet » à Kristiansand, en Norvège.
Source: Meggi Pieschel, Insa Eschebach, Amélie zu Eulenburg; „The Roses in Ravensbrück. A contribution to the history of commemoration.” Exhibition catalogue, 2015 Metropol Verlag
Amicale de RAVENSBRÜCK et des Kommandos Dépendants 10 rue Leroux Porte 25 75116 PARIS